21 Décembre 2024
Chers amis,
Le 8 décembre nous avons fêté la Conception de Marie, la Mère de Dieu. Nos frères de l’Eglise de Rome nomment cette fête l’Immaculée Conception et ils en ont fait un dogme au 19e siècle. Une grande dévotion s’est répandue autour de cette notion d’Immaculée Conception en Occident or c’est une importante divergence entre l’Eglise catholique romaine et l’Eglise orthodoxe.
Ce dogme de l’Eglise de Rome déclare que Marie a été préservée du péché originel vu les mérites à venir de Notre Seigneur Jésus Christ. Mais si Marie avait été en quelque sorte isolée du reste de l’humanité par un privilège de Dieu, lui conférant d’avance l’état de l’homme avant le péché, alors que deviendrait son consentement libre à la volonté divine, que deviendrait sa réponse à l’archange Gabriel ? ils perdraient le lien de solidarité historique avec tous les autres actes qui contribuèrent à préparer, au long des siècles l’avènement du Messie.
Alors que deviendrait la longue généalogie du Seigneur que nous lisons à Noël ? Elle serait inutile ! que deviendrait l’extraordinaire travail sur lui-même du peuple hébreu pour produire ce fruit de sainteté, de pureté, de virginité qu’est Marie ? Il serait inutile ! Ce serait donc tout le premier testament qui en raconte l’histoire qui serait obsolète, ainsi que le début de l’Evangile.
Mais non ! Marie n’est pas un être passif et manipulé par Dieu, elle est la virginité acquise par toute l’humanité. Face à la virginité librement perdue par Eve, la nouvelle Eve en fait librement la reconquête.
Ce ne peut d’ailleurs pas être autrement car si c’est Dieu et non l’humanité qui construit la virginité de Marie en Marie, pourquoi Dieu avait-il besoin d’attendre la Vierge ? Marie n’est pas un instrument passif entre les mains de Dieu, elle avance en conquérante comme le dit St Jean de Saint-Denis et avant lui St Grégoire Palamas.
Certes elle était pleine de la Grâce divine, mais parce qu’il y avait rencontre entre la Grâce et la volonté humaine, c’était une synergie. S’il n’y a pas synergie, tout s’écroule : il n’y a plus besoin d’efforts spirituels, plus de conquête, plus d’évolution, reposons-nous !
Plus de carême, plus d’avent, laissons-nous aller au gré de nos tendances, de nos pulsions, reposons-nous ! Oui reposons-nous car nous sommes libérés du péché par les seuls « mérites du Christ », c’est en tous cas à cela que nous amène ce dogme tardif et tant pis pour l’histoire d’amour de ce Dieu qui attend Sa bien-aimée, Sa créature.
Les fiançailles de ces deux amoureux fous du Cantique des Cantiques deviennent alors un mariage bourgeois, arrangé par le Père, un mariage forcé en quelque sorte.
Mais Marie est une femme libre, fruit d’un peuple, d’une humanité qui a conquis sa liberté et c’est pourquoi elle peut-être aujourd’hui pour nous un prototype, un modèle, un chemin.
Avec toute mon affection en Christ !
Père Pascal
Note
Le dogme catholique de l'Immaculée Conception est fondé sur la doctrine du péché originel d'Adam et Eve et sa transmission à l'humanité ainsi que Saint Augustin l'a compris. Dans cette compréhension théologique le péché d'Adam et Eve se transmet à chaque homme.
La conscience catholique ne conçoit donc pas que le Verbe puisse s'incarner dans une femme qui ne soit pas sainte, pleine de grâce, c'est-à-dire que même sans péché personnel elle soit souillée par le péché originel. Elle doit donc avoir été mis à part de cette faute originelle.
Au contraire de Saint Augustin les Pères de l'Eglise pensent que l'homme n'hérite d'Adam et Eve que la mort mais pas son péché de désobéissance. L'homme et donc Marie ne portent pas dans cette conception la culpabilité d'Adam et Eve. Marie sans pèché personnel est donc sainte et pleine de grâce et n'a pas besoin d'être mise à part.
De ces deux conceptions théologiques découlent deux façons de comprendre la fin de la vie de Marie sur terre. Pour les catholiques lors de l'Assomption Marie qui est mise à part de la faute d'Adam et Eve ne meurt pas et monte au ciel vivante. Pour les orthodoxes Marie meurt - elle s'endort, on appelle cet évènement la Dormition -, le Christ accueille son âme (dans les représentations iconographiques les plus anciennes l'âme de Marie est représentée par un petit enfant emmailloté : ), la remet à un ange qui la rendra au corps de Marie montée au ciel. Elle est donc en dehors du Christ ressuscité le premier être humain ressuscité et glorifié dans son corps sans attendre le jugement dernier.